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jeudi 27 novembre 2014

Au manoir des frissons frissonnants

Prenez votre mug de chocolat chaud, et préparez-vous pour une évasion des plus réussies au Manoir des Frissons frissonnants où vous ferez la connaissance de l'adorable Lili, la fille de Lord Goth, maître des lieux. Lord Goth ne s'est jamais remis de la perte de la mère de Lili et oblige sa fille à porter de bruyants godillons pour l'alerter de ses déplacements et pouvoir ainsi l'éviter. Car il lui est trop douloureux de passer trop de temps avec sa fille sans que celle-ci ne lui rappelle le douloureux souvenir de sa mère. Pourtant, Lili aimerait beaucoup que sa relation avec son père ne se limite pas aux thés du mercredi, mais en attendant, elle n'a pas d'autre choix que de ravaler sa solitude et de penser à autre chose. Heureusement, elle vient de faire la connaissance d'Ismaël, une souris fantôme victime d'un affreux piège à souris. Maltravers, l'effrayant garde-chasse d'intérieur du manoir des Frissons frissonnants serait-il à l'origine de ce malencontreux incident ? Alors que Lili va aider Ismaël à reposer en paix, elle va partir à la découverte des recoins les plus cachés de sa demeure et se faire une bande d'amis au passage en rejoignant le "club du grenier".

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J'ai vraiment tout aimé dans cette lecture. L'histoire est à la fois toute mignonne et pleine d'originalité, et les illustrations de Chris Riddell rendent ce roman illustré délicieusement fantasque. Lili Goth et la souris fantôme est sans conteste le résultat d'une imagination débordante ! Le tout fourmille de détails, que ce soit dans les dessins ou dans l'écriture. Je tiens d'ailleurs à souligner la qualité de la traduction française qui est brillante. Comment ne pas être intrigué par des lieux comme "l'aile brisée", "l'arrière de l'arrière-jardin", "le lac des carpes bavardes", "les étables instables" ou encore "le marécage de la mélancolie" ? (je ne peux vraiment pas choisir !). Il y a de nombreuses références à la littérature classique (je pense notamment aux noms des gouvernantes - excellentissime !), des notes de pieds de page délicieuses et des situations cocasses qui se succédent les unes aux autres (une course de bicyclettes métaphorique !). Ce mélange pour le moins unique fait de Lili Goth un petit bijou qui plaira tant aux plus jeunes qu'aux adultes qui auront quant à eux tout le plaisir de repérer le foisonnement de références, et de s'émerveiller devant l'ingéniosité de Chris Riddell. Croyez-moi, vous passerez un excellent moment !

Je trouve par ailleurs qu'il ferait un excellent présent au pied du sapin. Quant à moi, je rajoute à ma Christmas wishlist la série Apolline du même auteur et qui promet d'être tout aussi savoureuse ! Ca me fera patienter jusqu'à la sortie française du tome 2.

Lili Goth et la souris fantôme, Chris Riddell, Milan, 224 p.

lundi 24 novembre 2014

Le zoo pétrifié

Dans ce premier tome, Cerise a environ 10 ans, et vit seule avec sa maman. Son rêve serait de devenir romancière comme son amie Mme Desjardins qui habite le village et l'encourage sur cette voie. Elle retrouve souvent ses deux meilleures amies, Line et Erica, dans leur cabane secrète perchée dans les arbres. C'est là que Cerise a aperçu pour la première fois celui qu'elle surnomme "Monsieur Mystère". Que peut bien mijoter ce vieillard aux vêtements tâchés de peinture, passant le matin accompagné d'animaux et le soir, revenant seul ?

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Son imagination fertile et sa curiosité invétérée mèneront Cerise sur les traces d'une aventure des plus adorables. C'est une enfant pétillante, intelligente et pleine de bonne volonté. Elle incarne typiquement l'héroïne à la fois mignonne et singulière dont le lecteur tombe immédiatement sous le charme. J'ai beaucoup aimé l'histoire qui est émouvante, et pleine d'originalité. Je garde un merveilleux souvenir de ma lecture qui m'avait accompagnée durant un trajet de train que je n'ai pas vu passer. J'ai été transportée par l'histoire, les personnages et l'univers. Car Les Carnets de Cerise est un vrai festin visuel. Les dessins sont inspirés, chaleureux et expressifs. Nul doute que ce petit bijou enchantera aussi bien les petits que les grands !


samedi 22 novembre 2014

I'm not sure I went to New York

Il y a un peu plus d'un mois, je revenais de New York. Je ne pense pas publier un carnet de voyage sur le blog, je pense qu'on trouve suffisamment de photos et d'infos sur la toile pour encore rajouter quelques banalités de plus. J'ai plutôt envie de faire un petit billet réflexif, simplement reprendre les pensées qui me viennent quand je repense à mon voyage.

Aller à New York était un rêve que je nourrissais depuis environ une dizaine d'années. Outre l'aspect financier, divers éléments ont fait que je savais à l'époque que New York, ce n'était pas pour tout de suite. Et ça m'allait très bien. Ca me faisait plus de temps pour en rêver, prendre note des endroits à ne pas rater, y voyager dans mes films préférés, en parler avec d'autres New York dreamers, et m'abreuver sans relâche de récits de voyage publiés sur mes blogs favoris. Et tout ça a élevé New York au rang de fantasme, le fantasme incarné du voyage.


Et je l'avais si bien rangé dans cette boîte que quand je repense à mon voyage depuis mon retour, j'ai souvent besoin d'un petit moment pour me réajuster à la réalité. Y suis-je vraiment allée ? C'est assez étrange, car il y a eu beaucoup de moments intenses, mais il y a eu aussi beaucoup de moments où j'avais l'impression d'observer la ville avec une certaine distance. Un peu comme quand vous rêvez, et que d'une certaine façon, vous en êtes conscient. Ca donne au rêve un sentiment de réalité, une réalité qu'on n'arrive pas à cerner. Et c'est souvent ce sentiment confus qui émerge en premier lorsque je repense à mon voyage.

Et puis les souvenirs affluent et ne cessent de me nourrir depuis. Magiques et uniques à ma mémoire. La vue du Rockfeller Center, Central Park, Brooklyn Bridge, Grand Central, les collections de peintures du MoMA et du Met, la boutique de la Public Library, le déjeuner au Cafe Lalo, les cookies de Levain Bakery (!), les courses au Zabar's, et puis les librairies... Books of Wonder, The Strand, le Barnes & Noble de Union Square... Les librairies sont bien souvent les endroits où je me sens le mieux et où étrangement, je prends le plus conscience de là où je me trouve réellement. J'aime ramener des souvenirs de mes voyages, des petites choses comme de belles cartes à encadrer ou des magnets pour mon frigo mais ramener un ou plusieurs livres (c'est souvent plusieurs, entendons-nous bien), ça, c'est toujours ce que je préfère. J'aime regarder ma bibliothèque et y voir les endroits où je suis allée. Parce qu'au fond, c'est quand je décroche mon tote bag de The Strand du porte-manteau que j'ai cette certitude. Oui, je suis allée à New York.

jeudi 20 novembre 2014

Le lys de Brooklyn

Il y a des livres qui vous marquent dans votre vie de lectrice, et Le lys de Brooklyn en fait indéniablement partie. Alors qu'il est peu connu chez nous (il a récemment été réédité), il fait partie des classiques modernes aux Etats-Unis. Et après m'y être plongée, je peux vous dire que cela n'a absolument rien de surprenant. Roman d'apprentissage dont l'action se déroule dans le New York du début du 20ème siècle, il dresse le portrait de Francie Nolan, notre jeune héroïne, ainsi que celui de sa famille. Sur environ deux décennies, Betty Smith nous raconte le quotidien plutôt rude des Nolan. Sans jamais tomber dans le misérabilisme, elle dépeint avec honnêteté une fresque familiale des plus poignantes.

Toute la force de ce roman réside dans ses personnages féminins qui figurent désormais sur la liste des personnages les plus beaux que j'ai eu la chance de rencontrer sur papier. Ils sont bouleversants, tellement humains et forts. Croyez-moi, vous ne sortirez pas indemnes d'avoir fait leur connaissance. Le lys de Brooklyn est un roman merveilleux qui parle de la vie dans ce qu'elle a de plus beau et de plus éprouvant. L'auteur aborde des thèmes universels tels que l'éducation, occupant une place centrale ici, la famille, la filiation et les racines, en passant par des thèmes plus difficiles comme la pauvreté ou l'alcoolisme. Il s'agit d'un roman unique, parfois triste mais finalement assez optimiste. Il nous enseigne de la plus belle façon qui soit que notre avenir nous appartient et que la fatalité n'est certainement pas une fin en soi.

Je vous ai glissé quelques passages qui figurent parmi mes préférés (il y en a tant !), vous pourrez ainsi vous faire une idée du style à la fois fluide et poétique de Betty Smith. Ce roman est pour moi un chef d'oeuvre que je relirai sans aucun doute, avec la certitude d'en retirer à chaque fois davantage.

"People always think that happiness is a faraway thing" thought Francie, "something complicated and hard to get. Yet, what little things can make it up ; a place of shelter when it rains - a cup of strong hot coffee when you're blue ; for a man, a cigarette for contentment ; a book to read when you're alone - just to be with someone you love. Those things make happiness."

"Who wants to die? Everything struggles to live. Look at that tree growing up there out of that grating. It gets no sun, and water only when it rains. It's growing out of sour earth. And it's strong because its hard struggle to live is making it strong. My children will be strong that way."

"She was made up of more, too. She was the books she read in the library. She was the flower in the brown bowl. Part of her life was made from the tree growing rankly in the yard. She was the bitter quarrels she had with her brother whom she loved dearly. She was Katie's secret, despairing weeping. She was the shame of her father stumbling home drunk. She was all of these things and of something more… It was what God or whatever is His equivalent puts into each soul that is given life - the one different thing such as that which makes no two fingerprints on the face of the earth alike."

♥ | A tree grows in Brooklyn, Betty Smith (1943), Arrow, 1992, 496 p. Lu en anglais. Traduction française : Le lys de Brooklyn. Disponible en poche.